© Daniel Pernet
De toutes les espèces de canards observables en Lorraine, les fuligules milouins sont parmi les plus fréquents et abondants. Ils ont pour habitude de se rassembler, souvent en grand nombre, aux mêmes endroits. Les milieux les plus couramment fréquentés sont les grands étangs, gravières et retenues d'eau comportant des zones pas trop profondes.
Les fuligules milouins font partie du groupe des canards plongeurs qui cueillent leurs aliments sur les fonds vaseux riches en végétation immergée. Mais leur capacité de plongée est limitée à 4 m de profondeur et à une durée de 10 à 30 secondes.
Ces oiseaux sont omnivores. La composition des menus varie au cours des saisons et selon les lieux de stationnements. La part prépondérante est tantôt constituée de plantes, graines, racines et rhizomes , tantôt de crustacées, larves et mollusques, comme les moules zébrées, en particulier dans notre région. Celles-ci sont avalées entières, le gésier musculeux broyant les coquilles, les sucs gastriques faisant le reste. Par ailleurs, les proies animales constituent l'essentiel du régime alimentaire des canetons.
En se nourrissant, les milouins basculent en avant et plongent un instant, puis immergent à peu près au même endroit. Leur morphologie est adaptée à cette pratique. Comme chez tous les canards plongeurs, les pattes qui servent de propulseurs sont davantage placées à l'arrière du corps que chez les canards de surface comme les colverts. Les fuligules sont donc peu aptes à la marche sur terre où à l'occasion ils ne s'y tiennent debout ou couchés que pour le repos et l'entretien de leur plumage. De même, leur corps plus massif et caréné ainsi que la surface moindre des ailes portantes les obligent pour décoller de l'eau à prendre un élan assez long en s'aidant des pattes autant que des ailes.
Au contraire, leurs cousins, les canards de surface comme les colverts, chipeaux, siffleurs et souchets sont capables de s'élever avec facilité de l'eau d'un seul coup.
De même, à l'opposé des canards de surface qui se déplacent aussi volontiers sur terre, les fuligules sont quasi-exclusivement aquatiques se tenant en général éloignés des rivages. Ce n'est que pour nicher et pendant la mue qu'ils recherchent l'abri des roseaux et de la végétation palustre qu'ils évitent en d'autres temps.
Dès le mois d'avril, c'est dans la végétation que les nids sont construits. Ce sont des amas assez hauts de feuilles et de tiges, pourvus d'une dépression garnie de matériaux plus fins. Ils baignent ou flottent même dans l'eau parmi les phragmites ou les joncs, iris et massettes.
C'est au mois d'août que les rassemblements de milouins sur les rares grandes surfaces d'eau préservées de toute activité humaine sont les plus importants. Les étangs du Domaine de Lindre sont à cet égard exemplaires. Venant de leurs stationnements dispersés, mais menacés, ces canards y peuvent effectuer en toute quiétude leur mue pendant laquelle ils sont incapables de voler. En cette période - camouflage oblige - les mâles perdent pour quelques semaines leur couleurs voyantes, leur plumage ressemblant alors davantage à celui des femelles en permanence bien plus terne et neutre
Au contraire, c'est à partir du mois d'octobre qu'ils revêtent leur nouveau plumage nuptial, le plus coloré. Par la suite, de nombreux individus fuyant les rigueurs climatiques du Nord, de l'Est et du Centre de l'Europe viennent rejoindre ceux qui ont élu domicile sur nos plans d'eau. La fin de l'automne et l'hiver offrent les meilleures occasions pour observer les fuligules milouins en même temps que bien d'autres espèces de canards, d'oies et de harles.