Parmi les quatre espèces de fauvettes nicheuses dans notre région, la Fauvette babillarde est la moins abondante. Là où elle est présente, elle est peu visible, sinon audible. Elle est tellement difficile à observer que les photographes qui ont pu en réaliser un cliché ne sont pas foule.
La livrée de cet oiseau est très neutre. Le dessus est brun grisâtre, le dessous blanc grisâtre, la gorge blanche, le dessus de la tête gris ardoisé plus sombre sur les joues. Elle n'a rien qui accroche le regard.
Toutefois, c'est son comportement qui la rend si difficile à voir. Elle évolue constamment sous le couvert des fourrés et des arbres même en chantant. Elle se déplace sans cesse et aussitôt entrevue, elle est déjà plus loin.
C'est d'autant plus déroutant que son chant est si typique qu'il ne prête à confusion avec celui d'aucune autre espèce. Un sonore rututututu ou rititititi , refrain qui est précédé par un gazouillis doux et mélodieux, mais sourd au point qu'il n'est perceptible que si l'oiseau est vraiment proche.
Ce cas n'est pas inespéré pour tout un chacun, car la Fauvette babillarde fréquente aussi nos jardins, à condition qu'ils soient pourvus de buissons denses. A l'instar de la Fauvette à tête noire, elle n'exclut pas les parcs des villes, au contraire des deux autres espèces de fauvettes de notre région : la Fauvette grisette et la Fauvette des jardins. Ce sont les fourrés et les haies en lisière de bosquets, bois, vergers et prairies qui constituent son habitat privilégié en plaine. En montagne, elle affectionne également les massifs de petits conifères, les riches sous-bois et la végétation rabougrie des bords de torrents.
La densité de cette espèce est toujours faible au contraire de la Fauvette à tête noire. Dans les milieux favorables on ne compte pas plus de deux couples / 10 ha. De plus, elle fait preuve d'une grande instabilité, en changeant souvent de cantonnement d'une année à l'autre. Pouvoir noter sa présence constitue donc chaque fois une découverte heureuse, même pour les observateurs avertis.
Migratrice au long cours et seulement visiteuse d'été en Europe, elle arrive dans notre région fin avril. Une fois le territoire choisi, le mâle bâtit l'assise du nid que la femelle achève. Construit soigneusement à l'aide de brindilles et tiges sèches, il est garni de radicelles, de duvets végétaux, de cocons d'araignées, de lichens, de crins et de fils. 5 oeufs, en moyenne, y sont couvés, la part du mâle étant irrégulière, voire nulle.
Après 11 à 13 jours d'incubation, les oisillons éclosent. Rapidement, ils débordent presque du nid, relativement petit, qu'ils quittent après un temps également de 11 à13 jours. Ils sont nourris, comme les parents, d'insectes et larves, pucerons et petites araignées. A ce régime s'ajoutent à la fin de l'été, diverses baies destinées sans doute à étoffer les réserves énergétiques indispensables pour soutenir le « marathon » qui les conduit dans leur quartiers d'hiver en Afrique de l'Est, du Tchad à l'Ethiopie.
Les départs pour ce parcours stupéfiant- en regard de la taille de l'oiseau, inférieure à celle d'un moineau - commencent dès fin août et s'achèvent courant septembre. Il faudra attendre à nouveau de longs mois avant de pouvoir observer et surtout entendre cet hôte ailé de notre région. Là, comme ailleurs, sa présence saisonnière est menacée par la diminution drastique des haies et buissons, particulièrement en milieu rural.