© Didier Collin
Les Hypolaïs polyglottes, ces passereaux au nom étrange, sont présentes en Lorraine, même à la périphérie des villes. Mais ces nicheuses en belle saison ne sont pas abondantes et leur plumage aux couleurs assez uniformes et discrètes n'attirent pas l'attention.
Cette espèce fait partie de ces passereaux dont la robe n'a rien de remarquable et qui peuvent donc être facilement confondus : pouillots véloces, Pouillot fitis, Fauvette des jardins, rousserolles effarvatte et verderolles, par exemple.
Pour pouvoir les observer, il vaut mieux connaître leurs milieux, en général bien particuliers, mais surtout savoir identifier leurs chants spécifiques. C'est le moyen le plus sûr, pour ne pas se tromper, par delà les détails anatomiques. Ces derniers sont souvent difficiles à reconnaître, car outre qu'ils sont subtils en l'occurrence, les oiseaux se tiennent en général à distance, évoluent dans la végétation et sont furtifs. Au contraire, leurs chants caractéristiques, répétés, voire durables, sont audibles d'assez loin au cours du printemps, le matin et le soir surtout.
Bien que n'étant pas très sonores, les vocalises de l'Hypolaïs polyglotte portent tout de même à plus de cinquante mètres. Ce sont ses facultés d'imitation qui lui ont valu le nom de polyglotte. En effet, en première partie de son chant, l'oiseau commence par délivrer quelques notes simples, détachées, répétées et souvent empruntées au Moineau domestique, mais aussi au Merle noir, à la Grive musicienne, voire à l'Hirondelle rustique.. Après ce prélude plus ou moins bref, suit un phrasé volubile, grasseyé, mélodieux et durable. Volontiers perché au sommet d'un buisson, bec grand ouvert et gorge vibrante, il répand son flot de sons précipités.
Cette espèce fréquente les milieux buissonneux plutôt denses des talus en friche, des landes, des lisières de forêts, des bords de chemin etc. Dans ses biotopes favoris, il lui arrive d'être en concurrence avec les Fauvettes grisettes qui ont le même régime alimentaire constitué d'insectes ainsi que de baies et de fruits à l'occasion.
Les hypolaïs, sensibles au froid et à l'humidité, affectionnent les expositions au Sud afin de pouvoir profiter au maximum de la lumière et de la chaleur. Ce besoin reste en adéquation avec l'origine méditerranéenne de ces passereaux. Jusqu'au XIXe siècle, ils n'étaient répartis qu'au Maghreb, dans la péninsule Ibérique, en Italie et dans le Sud de France. C'est au siècle dernier, qu'ils ont progressivement gagné l'Ouest et le Nord -Est. Les premiers - colons - seraient apparus en Lorraine vers les années 1970.
Cette modification de l'aire de répartition n'est pas propre à l'Hypolaïs polyglotte Ce phénomène a été observé chez bien d'autres espèces d'oiseaux et ce, avant même que l'on puisse le mettre en relation avec un changement climatique ou toute autre explication bien probante.
En août déjà les hypolaïs se mettent à repartir vers leurs quartiers d'hiver situés dans l'Ouest de l'Afrique tropicale, de la Sénégambie jusqu'au au nord du Cameroun. Les - Lorrains d'adoption - n'en reviendront que fin avril début mai pour donner naissance à une nouvelle génération de 4-5 oisillons.