© Jean-Louis Corsin
Ceux qui connaissent l'existence des Râles d'eau en Lorraine ne sont pas très nombreux. ; ceux qui les ont déjà aperçus encore moins. Ces oiseaux ne sont pourtant pas rares dans les diverses zones humides de notre région, mais ils y vivent très cachés, ne sortant guère dans la journée de la végétation qui les abrite.
Leur milieu de prédilection sont les roselières et les marais d'eau douce pourvues d'une végétation dense de plantes lacustres : roseaux, massettes, laîches, joncs etc. Cà et là, ils sont susceptibles d'occuper aussi les rives de cours d'eau lents, dès lors où ceux-ci présentent des endroits peu profonds, des atterrissements de vase et des bords de végétation touffue.
© Didier Collin
C'est tôt le matin et tard les après-midi qu'ils sortent d'habitude à découvert pour se nourrir sur une plage de boue en lisière des roseaux. Ce sont les moments où les promeneurs sont encore ou déjà à la maison, surtout en hiver, période la plus propice pour apercevoir cet oiseau, lorsque la végétation est plus dégarnie. Il n'est donc pas étonnant que la découverte de cette espèce soit plus l'apanage de férus d'oiseaux et d'autres animaux sauvages.
Si d'aventure, on réussit à l'apercevoir, il n'y à guère à se tromper, tout au plus à le confondre à première vue avec la commune poule d'eau. A peu près de la même taille, comme une tourterelle, il s'en distingue par son bec rougeâtre bien plus long et un peu arqué, la tête plus effilée, les barres blanches et noires bien visibles sur l'arrière du flanc, le dessus plus marron clair et tacheté de noir, les pattes plus brun- rosées que jaunes. Vu de profil, il paraît trapu, vu de derrière au contraire efflanqué. Cette étroitesse du corps lui permet de se faufiler plus facilement dans la végétation.
Le Râle d'eau est plus souvent audible que visible. Son cri est fort et discordant -comme celui d'un porcelet qu'on égorge- Mais les spécialistes ont remarqué que son répertoire vocal est bien plus riche que le kruîîh kruîî krui kruih sonore et decrescendo entendu d'ordinaire. Il sert à garder le contact avec des congénères voisins, mais en même temps et à l'opposé, d'affirmer la possession d'un territoire qu'il tient à occuper seul ou en couple et dont il chasse les intrus de toutes espèces d'oiseaux. Son nom français proviendrait du latin rasclare, à savoir racler.
En raison de ses cris étranges et de ses mœurs dans les milieux marécageux réputés très hostiles autrefois, cet oiseau avait une mauvaise réputation. Pourtant rien dans son comportement ne produit la moindre nuisance. Il se contente de vivre caché et de ne s'alimenter que de pitances sans intérêt pour les humains : insectes, larves, vers, sangsues, crustacés, araignées, têtards etc. Il a l'insigne habitude de laver ses proies en les secouant dans l'eau. En hiver il complète son régime de graines et de pousses, voire de baies.
© Aurélien Audevard
Les râles de notre région sont en grande partie sédentaires, sauf si un gel durable les pousse à migrer vers des contrées plus clémentes. Les oiseaux plus nordiques se déplacent à l'automne vers l'Ouest et le Sud de l'Europe.
Une majorité de Lorrains ne verront jamais le Râle d'eau à défaut de s'en donner la peine et la patience. Mais, il devrait être intéressant pour eux de savoir que cette espèce fait partie de leur patrimoine naturel ancestral.