Les oiseaux, pas aussi bêtes que leur réputation.
Mésange bleue © Léo CollinL'unique stratégie des oiseaux est de se nourrir pour vivre et de vivre pour se reproduire. Elle est inscrite dans leurs gènes et résume tous leurs comportements. Pour autant, les oiseaux ne sont pas des automates.
A l'intérieur de ce grand cadre fixe, ils font preuve de tactiques très diverses selon les espèces et, de façon beaucoup plus étonnante, entre individus d'une même espèce en fonction des circonstances. Constamment les oiseaux procèdent à des choix en vu d'utiliser la solution optimale pour répondre à un et le plus souvent à plusieurs besoins : la sécurité contre les prédateurs, l'économie de l'énergie dépensée, la valeur nutritive des aliments disponibles, la protection contre les températures extrêmes et les intempéries etc.
Pic épeiche
© Jean Charennat Les pics jettent leur dévolu par priorité sur un arbre mort ou dépérissant pour creuser leur loge. Le Pic épeiche cale les noix qu'il va ouvrir dans des cavités naturelles ou spécialement creusées à la dimension de la noix à briser. Les Loriots d'Europe bâtissant leur nid volumineux à l'extrémité d'une branche d'arbre pour le préserver des martres, doivent apprécier la résistance du support. Chez le Troglodyte mignon le mâle construit plusieurs ébauches de nids et c'est la femelle finalement, en garnissant l'intérieur de l'une d'entre elles par des matériaux plus fins, qui indique la construction qui lui convient. Il a été observé qu'un merle pour tapisser plus facilement le fonds de son nid, trempe des feuilles mortes dans l'eau d'une bassine pour les assouplir. Les nids de rouge-queue à front blanc dans une boîte à lettre ou une bouche d'aération ne sont pas rares et témoignent d'une fantaisie individuelle qui contredit l'idée d'un déterminisme étroit et fixe.
Si tel était le cas, les nombreuses espèces qui ont colonisé les agglomérations n'eussent pas été capables de s'adapter à des conditions bien éloignées des milieux qu'elles fréquentaient primitivement à l'exemple du rouge-queue noir et de la Tourterelle turque.
La recherche de nourriture n'est pas une activité automatique non plus. Au cours de la belle saison quand les aliments sont abondants, ce n'est pas la pitance la plus à portée de bec qui est absorbée. La plupart des oiseaux sont en mesure de faire un choix entre plusieurs partis possibles en vue d'équilibrer leur besoins alimentaires qui ne sont pas les mêmes selon qu'il s'agit de la ponte et de l'incubation , du nourrissage des jeunes, de la mue ou de la migration Pendant le nourrissage des jeunes étourneaux, les chenilles éventuellement cherchées loin sont préférées par les parents aux larves de stipules tout près du nid, mais qui ont une valeur nutritionnelle moindre.
Martin pêcheur d'Europe © Jean CharennatPour atteindre la pitance dont ils ont besoin, les oiseaux savent improviser des méthodes qui forcent leurs dispositions naturelles. Les étourneaux " bâtis " pour trottiner dans l'herbe ou bien se percher, sont capables à l'occasion de se surpasser en s'agrippant ventre en l'air à une boule de graisse destinée aux mésanges.
On peut observer en automne des corbeaux freux laisser choir de haut des noix sur un sol dur pour casser la coque. Les grives musiciennes se servent d'une pierre comme enclume pour briser les coquilles d'escargots. Que dire des cormorans qui se groupent en bande serrée à la surface d'un étang pour attirer sous eux les poissons en quête d'ombre protectrice et qui brutalement plongent tous ensembles pour capturer ces imprudents.
La capacité des oiseaux à mémoriser est évidente. Qu'une hirondelle des fenêtres retrouve tous les printemps son nid sur la même maison à Ancy sur Moselle après un voyage retour de 6000 km dénote une aptitude stupéfiante. Il en est de même de la Rousserolle verderolle coutumière de reproduire par imitation, des dizaines de séquences de chants d'oiseaux qu'elle a entendus en hiver sous les tropiques. Pour un certain nombre d'espèces comme les Pinsons, Verdier, Chardonnerets, Rossignol etc. le chant typique n'est pas inné. Il est appris en écoutant les parents.
Ce ne sont là que quelques exemples de manifestations d' "intelligence " constatables par tout un chacun. Ils sont largement confirmés par des études et expériences scientifiques effectuées sur le terrain ou en laboratoire.
De fait les oiseaux possèdent par rapport à leur poids un énorme cerveau. Pour un poids de cinq grammes, le roitelet a 250 milligrammes de cerveau. S'il pesait 70 kg, son cerveau atteindrait 3 kilos et demi ! De plus les éléments nerveux du cerveau des oiseaux sont très miniaturisés et en comptent donc à poids égal, un nombre infiniment plus grand que celui des mammifères. Le cerveau des oiseaux est donc bien plus performant et puissant que ce qui est communément admis.
Qu'on ne s'y m'éprenne donc plus ! Dire de quelqu'un qu'il a une cervelle d'oiseau ou qu'il est une tête de linotte constitue en réalité un beau compliment.