Le pic épeiche et le pic vert



Parmi les six espèces de pics nichant en Moselle, le Pic épeiche et le Pic vert sont les plus répandus. Ils fréquentent même les parcs et les jardins de nos agglomérations où ils se signalent par leurs cris de contact saccadés et sonores.


Ce sont des oiseaux grimpeurs montant ou descendant à reculons, le long des troncs et branches d'arbres. Les arbres sont aux pics ce que les étangs sont aux canards. C'est le milieu où ils se nourrissent, mais surtout celui où ils nichent exclusivement. Leur aptitude à l'escalade est d'abord imputable à l'anatomie de leurs pattes, courtes avec deux doigts en avant et deux en arrière munis d'ongles forts. Ces griffes font d'ailleurs un bruit bien audible lorsque les pics se déplacent sur un arbre. Leur deuxième atout est la rigidité des plumes de la queue qui peut servir ainsi de point d'appui et d'élan pour la progression.


Une autre caractéristique commune à tous les pics est de posséder un bec exceptionnellement fort pour pouvoir perforer et creuser le bois. Il continue d'ailleurs à pousser régulièrement pour compenser l'usure consécutive à son emploi. Le bec est utilisé comme un levier pour arracher les fibres de bois par des mouvements latéraux de la tête.


Cette faculté leur est indispensable pour creuser leurs cavités dans les arbres où non seulement ils nichent exclusivement, mais encore où ils dorment toute l'année, alors que la majorité des oiseaux n'occupe leurs nids que pour la reproduction.


Presque tous les mâles des oiseaux forestiers ont des couleurs vives pour pouvoir mieux se signaler à leur partenaire ou leurs concurrents dans les frondaisons sombres et enchevêtrées des arbres. Les pics ne font pas exception, ajoutant pour une meilleure reconnaissance, une voix puissante et le tambourinage qui est une autre de leurs exclusivités.


Ce martèlement extrêmement rapide n'a aucun rapport avec la quête de nourriture par creusement. Exécuté surtout à la fin de l'hiver et au début du printemps, il sert à la recherche d'une partenaire et à l'affirmation du territoire. Outre que les pics savent parfaitement repérer les branches mortes, bourrelet de bois, voire poteaux télégraphiques et volets qui offrent la meilleure qualité de résonance, chaque espèce a une manière spécifique de tambouriner qu'il est bien utile de connaître pour l'identification à grande distance.


Le Pic vert dont les cris, ressemblant à un éclat de rire précipité et très tonitruant, portent très loin, tambourine bien moins que le Pic épeiche. Le premier a la taille d'une tourterelle, mais le corps très fuselé. Il a le dessus vert foncé et le dessous vert gris. Le front, le dessus de la tête et la nuque sont rouges, de même que la moustache chez le mâle. Le croupion est jaune et l'oeil noir cerclé de blanc.


Bien plus petit, le Pic épeiche a le dos noir largement marqué de blanc à l'épaule, les ailes noires tâchées de blanc, une tâche rouge sur la nuque, les joues blanches encadrées de noir, le dessous blanc, non rayé, le croupion rouge.


Tout en étant tous les deux des insectivores, ils ont des habitudes alimentaires bien différentes. Le Pic vert se nourrit à 90% de fourmis, accessoirement de vers de terre, limaçons, escargots, et occasionnellement de baies, fruits, graines de pin et glands. Les fourmis sont atteintes en creusant avec le bec des trous dans le sol et en les captant avec sa langue visqueuse qui peut sortir d'environ 10 cm. C'est dire que le Pic vert se nourrit essentiellement à terre et qu'il lui faut des surfaces découvertes : herbages, prairies, gazons en lisière de bois ou dans les vergers.


Le Pic épeiche au contraire est très éclectique et essentiellement arboricole pour la nourriture. Il descend rarement à terre. Une grande variété d'insectes est capturée sur ou sous les écorces, dans les fissures mais aussi dans le bois des arbres. Il se nourrit de chenilles, de larves, diptères, araignées et surtout coléoptères comme les capricornes. Son régime est complété par les graines et semences de conifères, des noisettes, noix, gland et noyaux de fruits dont il extrait l'amande. Il utilise d'ailleurs à cet effet des fentes d'arbres qui serviront d'étau pour y bloquer ses prises et les déchiqueter plus facilement.


Pendant longtemps les pics ont été considérés comme nuisibles du fait de leur activité sur les arbres. Ce n'est que depuis 1950 que tous les pics sont protégés en France. Outre que ces oiseaux vivent isolés sur leur territoire étendu, ils cherchent à économiser leurs efforts, comme la plupart des animaux dans la nature, et s'attaquent donc essentiellement à des arbres morts ou malades pour pouvoir plus facilement y creuser leur trou et y trouver un plus grand nombre de proies parasites. Des études ont démontré que l'action des pics en cas de pullulation d'insectes ravageurs, notamment chenilles, n'était pas négligeable. Mais le rôle écologique des pics est bien plus large. Les cavités creusées et abandonnées par eux peuvent ensuite être "squattées" par une variété d'autres espèces cavernicoles, mais inaptes à creuser le bois : mésanges, grimpereaux, Sittelle torchepot, gobe-mouche noir, chouette etc. Ceci est vrai dans les forêts, mais aussi dans les parcs et jardins à condition d'y laisser un minimum de vieux arbres, ce qui est d'ailleurs pratiqué, ça et là, depuis quelques années, par les services de l'O.N.F. Alors de grâce ne vous hâtez pas d'éliminer systématiquement tous les vieux arbres dans vos vergers et vos jardins.


Créé le 11/01/2003 par Gilbert Blaising © 1996-2024 Oiseaux.net