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LES VOYAGES DUNE HIRONDELLE
(A. DUBOIS -1886)
Sommaire 1�re Partie - 2�me Partie



XII. - ANIMAUX MONSTRUEUX.
Bathoum. - L'hirondelle filif�re. - Les flaques d'eau de l'Atbara. - Refuges dangereux. - L'hippopotame. - L'oiseau des pluies. - Le repas d'un monstre. - Chasseur europ�en. - On a souvent besoin d'un plus petit que soi. - Une lutte terrible. - Les martinets nains. - Un nid dans une feuille. - Le Nil bleu.


J'arrivai au confluent de l'Atbara qui conduit au Nil les eaux de l'Abyssinie orientale, et bient�t j'atteignis Khartoum, � la jonction du Nil Bleu et du

Nil Blanc. Je restai quelque temps dans cette ville, o� les voyageurs qui veulent explorer l'int�rieur de l'Afrique ne manquent jamais de s'arr�ter pour proc�der � leurs derniers pr�paratifs ; et je vis souvent de nombreux troupeaux d'esclaves noirs, conduits comme des animaux sur les march�s, par les ma�tres barbares qui s'en �taient empar�s.

Moi, du moins, j'�tais libre, et ma s�curit� aurait �t� compl�te si je n'avais pas eu � redouter les attaques des oiseaux de proie, car les habitants de ces contr�es ne chassent pas les hirondelles.

C'est � Khartoum que je rencontrai pour la premi�re fois l'hirondelle Pilif�re, vive, agile, gracieuse, l�g�re, et dont le chant et les moeurs se rapprochent beaucoup de ceux de notre esp�ce.

Elle niche dans les vieux murs, dans les constructions en ruines, dans les enfoncements des rochers.

Son nom d'hirondelle filif�re lui vient des deux rectrices externes qui se prolongent bien au-del� des autres, en brins filiformes, et qui lui donnent une remarquable �l�gance. Elle a la face sup�rieure du corps d'un beau bleu m�tallique, le sommet de la t�te roux, les joues noires, le ventre blanc.

Bient�t, nous ne f�mes toutes qu'une seule famille, et nous rasions en fol�trant tous les cours d'eau du pays o� les insectes pullulaient.

L'Atbara qui, pendant la saison des pluies, a plus de quatre cents m�tres de largeur et dix m�tres de profondeur, est absolument � sec pendant plusieurs mois de l'ann�e ; son lit forme alors une nappe de sable �blouissante qui se confond avec le d�sert.

Par intervalles, il reste d'immenses flaques d'eau clans de profondes cavit�s creus�es naturellement au-dessous du lit moyen de la rivi�re ; et ces �tangs, dont quelques-uns ont plusieurs kilom�tres cl� longueur, servent de refuge aux crocodiles, aux hippopotames, aux poissons et aux tortues de grande esp�ce qui s'y entassent en quantit�s prodigieuses, jusqu'au moment o� les pluies, en alimentant de nouveau l'Atbara, pourront leur rendre leur libert�.

L'hippopotame est assur�ment l'animal le plus massif, le plus lourd, le plus monstrueux qui existe ; sa t�te quadrangulaire est caract�ris�e par un museau d'une longueur et d'une largeur extraordinaires, ses dents, recourb�es en demi-cercle, atteignent jusqu'� un m�tre de longueur, et le monstre, dont le poids est parfois de plus de 3,500 kilogrammes, d�passe souvent quatre m�tres cinquante centim�tres de longueur.

L'eau, projet�e avec force, s'�l�ve en �ventail � plus d'un m�tre au-dessus de la surface de l'�tang, un soupir particulier ou un sourd grognement se fait entendre, et l'hippopotame para�t pour respirer. On distingue la t�te, masse hideuse et informe d'un brun roux, avec deux pointes qui sont les oreilles, et quatre �minences qui marquent la place des yeux et des narines ; un instant apr�s, cette t�te dispara�t pour repara�tre encore au bout de trois

ou quatre minutes, car l'hippopotame ne peut pas rester plus longtemps sans respirer quand il n'est pas bless�.

Lorsque le lieu est compl�tement d�sert, les hippopotames quittent l'eau, se vautrent dans la vase, et s'�tendant � l'aise, se livrent au sommeil ; de temps en temps un vieux m�le pousse un grognement, rel�ve la t�te, et inspecte les alentours. J'�tais �tonn�e de voir plusieurs oiseaux s'agiter au milieu de ces monstres ; l'un deux, que les indig�nes appellent l'oiseau des pluies, enlevait adroitement de leur peau les sangsues et de nombreux insectes qui y adh�raient. Un petit h�ron se promenait gravement sur le dos des horribles b�tes et travaillait � les d�barrasser de la vermine qui s'attache � leur corps.

L'hippopotame nage avec une rapidit� incroyable ; et, lorsqu'il est tranquille, l'eau reste autour de lui lisse et immobile ; mais s'il est attaqu�, bless� et qu'il s'�lance avec fureur, il jette ses pattes post�rieures en arri�re, s'avance par bonds, produit de forte vagues, et sa puissance est telle qu'il peut soulever et mettre en pi�ces des bateaux de moyenne grandeur.

Un jour, je vis un de ces hideux animaux qui, doucement balanc� par le mouvement de l'eau, broutait les joncs, les roseaux, les papyrus, les grands n�nuphars et cent autres plantes remarquables par leur couleur et leur parfum.

Ce spectacle avait quelque chose d'horrible ; sa gueule immense, s'entrouvrait, sa t�te informe disparaissait sous les plantes, l'eau se troublait au loin ; l'hippopotame reparaissait avec un gros faisceau de v�g�taux, qu'il d�posait � la surface pour les m�cher et les avaler lentement et avec d�lices. Les tiges pendaient de chaque c�t� de ses �normes m�choires, et leur suc verd�tre, m�l� � la salive, d�coulait lentement des l�vres ; ses yeux �taient fixes, mobiles, sans expression, et les dents se montraient dans toute leur longueur.

Rien ne semblait devoir troubler la b�atitude du g�ant, lorsqu'un coup de feu retentit. Il y avait l� un chasseur europ�en, accompagn� de quelques n�gres. La balle avait frapp�, sans pouvoir y p�n�trer, le cr�ne �pais de l'animal : Furieux, il rugit, autant par sa raret� que par les singularit�s de sa conformation.

Quand les Romains �tendirent leurs conqu�tes en Afrique, ils connurent la girafe et en orn�rent leurs f�tes triomphales. Son nom antique zurapha, d'o� son nom actuel de girafe, ne vint point jusqu'� eux. Ces farouches vainqueurs auraient craint, en s'enqu�rant des m�urs et des coutumes �trang�res, d'affaiblir les ressorts de haine et de m�pris qu'ils portaient aux barbares. La girafe passa de leurs mains, pour la, premi�re fois, dans celles de C�sar, � titre de tribut, mais leur orgueil repoussait tout document qui l'aurait concern�e.

Es la nomm�rent donc � leur mani�re, l'appelant camelopardalis, chameau-l�opard, ils lui avaient, en effet, trouv� du rapport, d'abord avec le chameau, par son volume, par quelques traits de sa physionomie, par son museau effil�, son long col, ses l�vres prolong�es et singuli�rement mobiles, etc... et ensuite, avec la plupart des grandes panth�res, par les taches de son pelage.

On trouve, dans les auteurs du Moyen-�ge, qu'en 1486, l'Egypte envoya une girafe � un duc de M�dicis, ma�tre de Florence. La girafe de cette �poque s'�tait identifi�e, quant � ses sentiments du moins, avec tous les premiers �tages des belles maisons de la ville, elle allait tous les jours prendre un de ses repas des mains des dames florentines, dont elle �tait devenue la fille adoptive, ce repas consistait en plusieurs sortes de fruits, de pommes principalement.

Le bel animal dit roi, c'est le nom donn� � la girafe sur toute sa route dans le midi de la France, a �t� diff�remment nourri...

La girafe, dans son pays natal, broute les sommit�s des arbres, pr�f�rant les plantes de la famille des mimosas qui y abondent... Ce qui montre qu'elle n'a point renonc�e � ses habitudes natives, c'est qu'elle accepte avec bonne gr�ce les fruits et les branches d'acacia qu'on lui offre. Elle saisit le feuillage d'une fa�on tr�s singuli�re, faisant sortir � cet effet une langue longue, rugueuse, tr�s �troite et noire, et l'entortillant autour de l'objet qu'elle convoite...

On dit la girafe un animal du d�sert, et l'on s'�tonne ensuite qu'elle y trouve � subsister. Ceci repose sur une fausse pr�occupation de l'esprit. Effectivement, comment croire qu'un animal d'un volume aussi consid�rable se tienne o� ne serait pour lui aucune ressource d'alimentation ? Un sol �pre et br�l� du soleil, comme est celui du d�sert, ne saurait rien fournir, pas plus � la girafe qu'� d'innombrables troupeaux d'antilopes qui s'y trouvent r�pandus � des heures marqu�es.

Tous ces animaux sont d'autant plus exigeants sur la nature et l'abondance des p�turages, que leur grande taille rend leur consommation plus consid�rable. Or, ils trouvent sans difficult� les aliments qui leur sont n�cessaires, on se tenant � port�e des terres arros�es et par cons�quent, tr�s riches en v�g�tation, lesquelles forment, en Afrique, de tr�s grands espaces, de vastes Royaumes ; ils viennent faire cur�e dans les lieux qu'ils d�vastent et qu'ils laissent d�sol�s, apparaissant, comme la gr�le dans nos pays, pour tout ruiner sur leur passage. Le d�sert n'est donc pour ces animaux l�gers � la course qu'un lieu de refuge, comme sont nos for�ts pour les sangliers qui ont ravag� des champs dans les plaines voisines. Le d�sert, qui procure, en Afrique, de vastes emplacements � horizon fort �tendu, est ainsi le lieu que pr�f�rent, apr�s s'y �tre repues, les girafes et les antilopes, toujours entour�es d'ennemis puissants et excit�s par une faim d�vorante. L�, ces animaux sont dans un �veil continuel et pleinement efficace ; car, dans le d�sert, ils voient � une grande distance, ils ne craignent point d'y �tre surpris. L�, leur active surveillance, comme la vitesse de leur course, d�rangent les combinaisons les plus habiles, et rendent inutiles tous les pi�ges qui leur seraient tendus. Aussi les lions, qui ont une exp�rience des ressources qu'on leur oppose, ne perdent-ils point leur peine � des poursuites sans r�sultat ; ils pr�f�rent attendre pr�s d'une fontaine o� l'on viendra boire, � port�e d'une riche prairie o� l'on sera tent� d'arriver pa�tre, ou, � l'�gard des girafes, aupr�s d'un fourr� de mimosas, dont les sommit�s seraient une autre sorte de rhlie p�ture. Les lions en embuscade, aid�s par d'intelligents associ�s leurs pourvoyeurs, les caracals, sont plus efficacement servis par le rabat du gibier pr�s du lieu o� ils se tiennent cach�s ; ils aiment mieux d'un seul bond tomber � l'improviste sur une proie surprise et mise hors d'�tat d'user de ses derni�res ressources.

Cependant, les girafes et les antilopes n'entrent dans abondants p�turages qu'avec une extr�me d�fiance ; de brandes pr�cautions sont oppos�es � d'industrieuses embuscades, et si elles ne peuvent fuir, les girafes sont pr�tes � la lutte. Il est donc un nomment critique o� les combattants viendront � se rencontrer et � se joindre.

Cotte girafe si douce au milieu de nous, qu'elle �tonne, � cet �gard, les curieux empress�s � la contempler, si maniable, si bonne personne, que, dans sa route, elle a permis qu'un jeune mouflon, n� pendant le voyage, fit de la brande �tendue de son corps le th��tre de ses �bats, de ses jeux enfantins, cette girafe si d�bonnaire, ai-je dit, dans une rencontre face � face avec le lion, n'est point d�nu�e de moyens de se d�fendre : cet animal, que nous observons dans une parfaite qui�tude � l'�gard de ses gardiens qu'elle distingue, et du public qui ne lui impose en aucune mani�re, trouve, dans son d�sespoir et dans le sentiment �nergique que lui inspire le besoin de sa conservation, une toute puissance gui peut devenir funeste au plus terrible, au plus redoutable des animaux. Quelquefois, si elle est encore en mesure de fuir elle rue � 1 a mani�re des chevaux ; mais elle est plis d�cid�e et plus confiante en ses moyens quand elle emploie les jambes de devant.

Le mouvement cl� ses jambes ant�rieures lui est si naturel qu'il se hisse apercevoir chez notre girafe, fort disciplin�e par la domesticit�. Si on l'approche et qu'on l'irrite, elle soul�ve et �carte chaque pied d� devant ; mais, par un effet de son extr�me bont� ou de ses moeurs domestiques, elle r�prime aussit�t et annule cette premi�re susceptibilit�.

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