A de très rares exceptions près, tous les oiseaux sont beaux.
On citerait volontiers le Guêpier, le Martin-pêcheur, des oiseaux colorés, largement honorés et très prisés. Il en est bien d’autres aussi, parfois plus discrets.
Mais, comme l’a si bien dit Monsieur de la Fontaine, la grace est plus belle encore que la beauté.
Elégante de la pointe du bec au bout des ailes, l’avocette s’accommode de tous les éclairages et même du temps gris, couvert qui sied si bien à son plumage noir et blanc.
Avec son bec retroussé, il est bien difficile de confondre l’avocette avec quelque oiseau que ce soit.
Nuque et tête noires, le mâle est un peu plus grand que la femelle dont le bec est plus court, à la courbure plus marquée. Ce sont de bien légères nuances qu’il est extrêmement difficile de remarquer en pleine nature.
Les oiseaux immatures peuvent être aisément reconnus grâce à la présence, sur leurs parties supérieures, de plumes d’un brun chamois. En principe, les avocettes ne sont aptes à se reproduire qu’à l’âge de 3 ans.
Le bec est noir, l’iris de teinte noisette, mais les pattes d’un bleu clair très élégant, et l’on remarquera, comme il se doit, les palmures de ces dernières.
L’un des plus grands parmi nos limicoles, elle a vraiment tout pour nous séduire. Elle se montre fidèle aux lieux qu’elle aime fréquenter.
Certaines de ses populations hivernent en France, tandis que d’autres viennent s’y reproduire, ce qui permet aux mieux lotis de la voir pour ainsi dire toute l’année.
Pendant l’hiver, La France accueille plus de 20 000 oiseaux et ceci fait de notre pays à notre pays l’une des toute premières régions d’hivernage, devançant l’Espagne qui doit se satisfaire de la moitié.
Ses troupes sont essentiellement localisées sur le littoral. Les hivernants sont assez rares le long des côtes de la Manche et restent marginaux en dehors de l’estuaire de la Seine.
Les principales concentrations se forment sur les baies et les estuaires de la frange atlantique, entre le Morbihan et l’estuaire de la gironde, un espace qui attire 80% des hivernants français.
Quelque 3 000 oiseaux passent la mauvaise saison en Camargue et sur les étangs languedociens.
Cette répartition reste assez similaire au moment de la reproduction bien que les chiffres soient d’une ampleur bien plus modeste avec, par exemple, environ 3000 couples en France, 8000 pour les Pays Bas, 4000 au Danemark et plus de 6000 en Allemagne.
Ses mœurs charmantes et riches nous la rendent également très attachante et font d’elle un bien beau sujet d’observation.
L’avocette arrive sur ses sites de nidification aux alentours du 15 mars après une mue pré nuptiale seulement, ce qui explique que l’on puisse observer, au sein des groupes, des oiseaux qui ne sont pas encore pleinement adultes et dont les couvertures brunes témoignent de la relative immaturité.
Les couples semblent se former en hiver et les oiseaux sont monogames, au moins pendant une saison de reproduction.
Cet oiseau est considéré comme un nicheur semi-colonial, ce qui sous-entend qu’il peut nicher en colonies mais aussi en couples isolés.
Il forme assez souvent des colonies mixtes avec l’échasse blanche.
Dès leur arrivée, les couples travaillent à la construction du nid sur les ilots qu’ils affectionnent, suivant un rituel assez proche de celui de l’échasse, une cousine avec laquelle ils montrent d’autres points communs. Il s’agit d’une petite dépression aménagée à partir d’apports de brindilles et, parfois, de coquillages. Chaque membre du couple y contribue activement, en rejetant vers l’arrière les matériaux voulus.
Les accouplements ont lieu selon un processus qui rappelle fortement celui en vigueur chez l’échasse à quelques nuances près. La femelle interrompt sa promenade et adopte une attitude sinon de soumission, du moins d’invitation. Chez elle, qui allonge le cou à l’horizontale, la position est très basse, au point que le bec frôle l’eau à la toucher. Elle doit faire preuve d’une patience certaine, car son époux continue sa toilette, sensiblement plus longtemps que ne le fait Monsieur Echasse. Au point qu’elle se lasse parfois et renonce à l’invite quitte à la renouveler peu de temps après.
Monsieur se décide enfin et saute sur son dos pour une étreinte assez brève.
On retrouve, une fois de plus, le comportement de l’échasse bien qu’il soit moins caractérisé ici.
A la fin de l’accouplement, les becs se croisent et les deux membres du couple font quelques pas ensemble, sans pour autant que l’on puisse véritablement parler de câlin final.
Entre le 15 avril et le 15 mai, 3 ou 4 œufs seront pondus et couvés pendant 23 jours en moyenne, alternativement par chacun des deux futurs parents. Lors des relais, l’arrivant respecte le rite symbolique en rejetant quelques brindilles en arrière.
D’un tempérament paisible, l’avocette ne défend pas de territoire à proprement parler, et il est assez rare d’être témoin de querelles avec ses congénères. Mais elle défend son nid avec ardeur y compris contre des oiseaux bien plus grands qu’elle, tels le Tadorne par exemple. Elle n’hésite pas, alors, à prendre des postures menaçantes et agressives.
Dès l’éclosion du dernier œuf, les poussins, nidifuges, quittent le nid, mais restent sous la protection des parents sous l’aile desquels ils se réfugient au moindre doute et aussi pour se mettre à l’abri du froid ou d’une chaleur trop intense.
Ils seront aptes au vol à un âge variant entre 35 et 45 jours.
Bien des menaces réduisent les chances de succès de la reproduction.
De trop fortes variations du niveau d’eau peuvent noyer la ponte, lorsque ce ne sont pas des maladresses des adultes qui conduisent les œufs sous l’eau.
C’est, bien entendu, la prédation qui constitue le principal danger. On connaît la mauvaise réputation du Milan noir à ce propos. La Mouette rieuse que l’on soupçonnerait moins est capable de ravages, allant jusqu’à affiner des stratégies, deux oiseaux venant attirer les parents avocette tandis qu’en leur absence un troisième capture les poussins.
Toutes causes confondues, le nombre de jeunes oiseaux à l’envol est très faible et ne dépasse guère 0.5 jeune par couple.
Fort heureusement, victimes de prédation, les avocettes ont le courage de reprendre entièrement leur cycle, avec à nouveau parades, accouplements, et pontes de remplacement.