Les passagers

Pour l’ami des oiseaux, l’année est évidemment rythmée par les saisons.

Dame Nature est si bien faite, prévoyante, que chacun peut commencer, finalement, son année à sa guise.

Au printemps, saison de renaissance, en hiver, saison d’espoirs, en été, saison de plénitude ou en automne, saison des chagrins, peut-être, saison des sanglots longs pour nos poètes, mais saison riche en couleurs.

Bien entendu, la migration dirige nos envies à la baguette.

Nous attendons l’automne qui va, du moins nous l’espérons chaque année, nous ramener nos hivernants.

Et puis l’hiver qui suit, avec ses tendre lumières, nous permet de revoir Grues, Canards, Bécassines et Vanneaux.

Entre autres.

Le printemps va s’ensuivre ; c’est l’explosion de la vie. Et puis la migration a deux sens : l’aller et le retour.

Si le début de cette magnifique saison nous prive de nos chers hivernants, elle reconduit vers nous d’autres amis qui sont allés passer la période des frimas plus au Sud.

Revenez donc à nous Gorge bleues, Milans, Echasses, Bergeronnettes !

La liste diffère sensiblement, bien sûr, selon la région que chacun d’entre nous habite.

Sans évoquer le cas très particulier de l’Ile d’Ouessant, certains attendent le superbe Pluvier guignard en Crau ou d’autres lieux.

En été, nous pourrons assister, émus, à la reproduction des Guêpiers ou du Héron pourpré, avec toujours les mêmes nuances régionales, incontournables.

L’automne servira de transition, avec les derniers départs concernant des jeunes un peu tardifs et souvent leurs parents qui les attendent.

En toutes saisons, nous profitons de la présence de nos sédentaires.

Migrateurs partiels, comme chez le Merle noir, ou sédentaires purs comme pour notre Moineau domestique, le Faisan de Colchide, ou la Perdrix grise, ils ne nous quittent pas.

C’est un petit bonheur ! Pas si petit d’ailleurs !

Nous ne saurions oublier pourtant les passagers, notre sujet.

Migrateurs, ils nous rendent visite sans pour autant hiverner ni se reproduire chez nous.

Ils font ce que l’on appelle des haltes migratoires.

Ainsi la Sarcelle d’été qui niche de préférence au Nord et à l’Est de l’Europe, s’arrête sur nos plans d’eau pendant quelques jours, voire quelques semaines.

On reste toujours étonné face aux milliers de kilomètres que parcoure ce bel oiseau revenant du Sénégal, du Niger ou du Mali et nous offre sa beauté, ses splendides scapulaires et, pour le mâle, une virgule blanche unique au monde des Canards.

Seuls les plus patients et les plus amoureux peuvent assister de près à ce spectacle fort en sons (car il faut ajouter sa belle voix de crécelle) et en lumières.

Son cas est assez particulier chez les passagers car ses visites sont assez régulières.

Avec la même régularité, le Crabier chevelu revient sur certains lieux.

Mais il ne s’agit que d’un oiseau par an ; mieux vaut aller vers le Sud, en Camargue, pour le voir plus souvent.

Dans ma région, il y a, comme ailleurs, des passagers rares, voire exceptionnels.

C’est le cas, notamment, du Phalarope (à bec large ou étroit) qui ne rejoint nos rivages que poussé par les tempêtes qui sévissent en septembre aux Etats-Unis.

Ce sont donc des circonstances météorologiques hors normes qui nous amènent ces oiseaux.

Le froid, la neige nous envoient des oiseaux comme le Harle piette ou bien la Nette rousse pour enrichir le livre des souvenirs.

Avouons que lorsqu’il fait -12°, il existe de bonnes raisons de changer de route.

Plus exceptionnel encore, le Pluvier fauve, sans tempête ni froid intense, a, un jour de l’an dernier, posé ses pattes au Teich pour un séjour de deux semaines.

Des passagers réguliers aux visiteurs exceptionnels, il est un petit pas.

Il faudrait bien sûr y ajouter d’autres oiseaux tels que les Plongeons Imbrin ou Arctique, le Fuligule à bec cerclé, le Harle couronné, les Ibis falcinelle ou l’Elanion Blanc.

Pour les deux derniers, il peut s’agir de conquêtes de nouveaux territoires.

C’est avéré pour l’Elanion.

Et il convient d’indiquer qu’en d’autres régions, le Bécasseau rousset ou le Bécasseau minuscule méritent d’être ajoutés à une liste qui ne saurait être exhaustive.

Voici qui prouverait, si besoin était, que l’ami des oiseaux peut nourrir les plus larges espoirs quant aux belles surprises qui l’attendent au détour du chemin.

Migrateurs, sédentaires, passagers réguliers ou exceptionnels…

Ou bien l’inespéré, totalement inattendu !

Créé le 19/01/2018 par Patrick Fichter © 1996-2024 Oiseaux.net