faisan mâle © Jean-Louis Corsin
Le Faisan de Colchide est connu par nombre de personnes. Il est spectaculaire par son plumage rutilant ainsi que par sa taille appréciable et il évolue souvent à découvert dans les près et les champs proches des routes.
On sait moins que cette espèce originaire de la Géorgie -autrefois la Colchide- a été introduite en Europe par les hommes à diverses époques déjà anciennes. En Europe du Nord-Ouest et du Centre, elle n'est toutefois commune que depuis deux cents ans.
mâle © Didier CollinTrès tôt, elle a fait l'objet d'un élevage pour les besoins de la chasse. A présent, les lâchers totalisent plusieurs millions d'individus par an, rien qu' en France. En très grande majorité, le sort de ces faisans semi-domestiques se termine plumés dans une cocotte avant qu'ils n'aient pu se reproduire en liberté. De plus, dans les élevages a-t-on procédé à des sélections, voire des hybridations en produisant des variantes éloignées de la race primitive.
Il n'est donc pas étonnant que les puristes aient tendance à - bouder - les Faisans de Colchide en dépit de leur beauté. En effet, les connaisseurs estiment que la très grande majorité de ces oiseaux visibles en Lorraine, sont issus de l'élevage. Ils sont d'avis que peu de milieux dans notre région sont vraiment propices à l'existence d'une population - sauvage - significative, au contraire de l'Alsace, de la Sologne et de certaines parties de l'Aquitaine bien pourvues en terres sablonneuses et limoneuses. Les faisans sont des oiseaux de plaines aux sols légers et meubles où il existe une structure variée de couverts denses alternant avec des près et des cultures, de préférence au bord des eaux. C'est ainsi que de façon un peu inattendue pour les non-initiés, le Faisan de Colchide est classé dans notre région sur la liste des espèces -nicheuses sédentaires, mais peu communes-.
© Hervé Michel
Pourtant, cet oiseau n'a pas des exigences alimentaires spécifiques qui pourraient ne pas être satisfaites à grande échelle dans notre région. C'est un omnivore. Les graines de céréales, fruits, baies, feuilles, bourgeons, fleurs, insectes, larves, lombrics, œufs de fourmis, limaces etc. constituent son menu.
Mais l'attachement héréditaire aux biotopes de ses ancêtres reste déterminant. A ces barrières écologiques se superposent, à des degrés divers, bien des facteurs défavorables, comme la chasse intensive, les pesticides agricoles, la pression humaine, la prédation naturelle des renards, sangliers, martres etc.. Toutes ces causes ont pour effet de limiter l'expansion ou seulement le maintien des populations de faisans sauvages dans bien des régions, dont la Lorraine.
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combat entre deux mâle © Patrick Marques
Somme toute, il apparaît donc positif que des lâchers de faisans d'élevage aient lieu. Il y a de la sorte de réelles chances que quelques individus échappant à l'hécatombe cynégétique, se naturalisent et se reproduisent mélangés à la sporadique population autonome Le seul risque est que ces individus libérés, mais peut-être modifiés, dégradent la typologie originelle de l'espèce.
En tout état de cause, il convient de ne pas dédaigner le spectacle d'un faisan, même si son authenticité naturelle reste souvent douteuse. Qu'importe ! L'éclatant costume de cet oiseau est toujours d'un grand agrément lorsqu'on a l'occasion trop rare de l'observer en liberté. C'est alors que sa vision suggère si bien l'image d'un courtisan d'antan qui, excédé par les fastes de la cour ducale, aurait pris la clef des champs sans avoir quitté son habit d'apparat.