Ce proche cousin du Moineau domestique est communément ignoré. Vrai campagnard, il ne fréquente pas nos agglomérations. Il est devenu rare et sa ressemblance avec le banal piaf, auquel on ne prête plus guère attention, nuit à sa considération.
A mieux regarder, aucune confusion n'est possible entre ces deux espèces d'allure et d'aspect semblables, mais de moeurs bien différents. Le friquet a une calotte brune et non pas grise comme le Pierrot ; sur la joue plus blanche il porte une tache noire caractéristique. Ces signes déterminants sont faciles à identifier d'assez près. De plus, la bavette noire est plus courte et sa taille plus petite. Mâles et femelles sont identiques à l'inverse des moineaux domestiques.
© René DumoulinCes derniers se sont approchés des hommes depuis que ceux-ci ont inventé les cultures en Mésopotamie. Depuis longtemps, ils sont même devenus des vrais citadins trouvant dans les agglomérations une large offre de prébende. Au contraire, le friquet est resté un rural farouche et indépendant qui ne pénètre qu'occasionnellement dans villages et faubourgs.
Sa prédilection va aux lisières de bois, aux bosquets, aux berges de cours d'eau et mares plantées de têtards, saules, peupliers, ormeaux, également aux vieux vergers, tous milieux qui offrent des troncs mutilés par l'émondage et riches en cavités pour y nicher. Sa présence est souvent très localisée. Nichant en colonie, ces oiseaux ont besoin de nombreuses cavités rapprochées.
© Jean CharennatTout au long de l'année, le régime de notre « paysan » comporte plus d'insectes que celui du Moineau domestique et moins de céréales. Cependant, vrai granivore, il consomme en grande majorité des graines de graminées, de renouées, de chardons et d'autres plantes sauvages. S'y ajoutent, en automne surtout, les fruits de sureau, frêne, merisier, prunier etc.
Sédentaires ou migrateurs partiels, leur nombre dans notre région s'accroît en hiver des individus ayant fui les rigueurs climatiques du Centre et du Nord de l'Europe. Ce constat reste toutefois très relatif. Depuis quelques années les effectifs du friquet ont subi une baisse très significative.
© Jean CharennatLes causes principales de ce déclin inquiétant sont d'une part, les pratiques agricoles modernes qui éradiquent systématiquement, à grand renfort de pesticides, les plantes adventices et les insectes, d'autres part les traitements réducteurs appliqués, y compris par les collectivités publiques, à toute surface en herbe transformée en gazon ras et uniforme, enfin l'élimination inconsidérée des arbres creux au bords des champs, des cours d'eau et des routes de même que dans les vergers.
Dans le cas, hélas probable, où ces méfaits perdureront, il est à craindre que les moineaux friquets aient complètement disparu de nos campagnes dans un avenir prévisible. Ce sera encore un pan de nature effondré qui s'ajoutant à d'autres, amenuise dans une triste indifférence, la biodiversité si précieuse pour l'agrément, la santé, voire la survie à terme, du genre humain.