Distinction de nos deux petites rousserolles, effarvatte et verderolle

par Jean FRANÇOIS, aidé de Dominique MARQUES pour la finalisation à destination du forum.

Avant-propos : Distinguer les petites rousserolles n’est pas chose aisée, déjà chez nous à la belle saison, a fortiori lors de la migration ou en hivernage en Afrique. Leur aspect est semblable et les différences de plumage sont faibles.
Heureusement, en période de reproduction, des éléments nous viennent en aide, la répartition, l’habitat qui donne une très bonne indication et les émissions vocales qui sont essentielles. Abordons ces différents points.
Pour simplifier le texte, je parlerai de Ref pour la Rousserolle effarvatte et de Rve pour la
Rousserolle verderolle.

L’habitat

La Ref est l’oiseau de la phragmitaie pure, appelée plus communément roselière, qui borde les eaux douces, plans d’eau ou cours d’eau. La photo 1 en donne un bon exemple. L’oiseau attache son nid aux tiges de phragmites.

Photo n°1 : milieu de la Rousserolle effarvatte - Lindre 57, photo JF

La Rve fréquente un milieu différent, un habitat de type prairial mais sans graminées, formé de plantes herbacées élevées, qui se développe sur sol humide et profond non loin de l’eau douce, mais là où les phragmites n’ont pas leur place. C'est une mégaphorbiaie dans laquelle se développent des plantes telles que l’Epilobe hirsute, la filipendule, l’ortie, le Cirse palustre, le Chardon bardane, l’angélique, la Berce spondyle et bien d’autres. On en trouve un bel exemple sur la photo 2. C’est un milieu élevé (1,5 m de hauteur en moyenne) et dense qui cache bien les oiseaux. Le nid est accroché aux tiges verticales de filipendule ou d’ortie.

Photo n°2 : milieu de la Rousserolle verderolle - Bonnevaux, Doubs, photo JF

Milieu mixte : il est des endroits où les deux espèces peuvent se côtoyer en période de reproduction car leurs biotopes sont voisins. La photo 3 en montre un exemple. La Rve niche dans les massifs d'ortie et autres grandes herbacées au premier plan tandis que la Ref occupe la roselière au second plan.

Photo n°3 : Milieu mixte - Droitaumont, 54, photo JF

Les caractéristiques corporelles

Le plumage tout d’abord. Les photos 4 et 5 montrent des adultes de profil, les ph 6 et 7, les mêmes de face, les ph 8 et 9, les mêmes encore de dos et enfin les ph 10 et 11 des juvéniles..

Photo n°4 -Rousserolle effarvatte © René Dumoulin
Photo n°5 - Rousserolle verderolle © Alain Chapuis
Photo n°6 - Rousserolle effarvatte © Patrick Baude
Photo n°7 - Rousserolle verderolle © Hervé Enoch
Photo n°8 - Rousserolle effarvatte © Hervé Enoch
Photo n°9 - Rousserolle verderolle © Aurélien Audevard
Photo n°10 - Rousserolle effarvatte ©Hervé Enoch
Photo n°11 - Rousserolle verderolle © Hervé Enoch

La Ref a les parties supérieures d’un brun assez chaud, particulièrement an niveau du croupion et des couvertures sus-caudales qui montrent nettement une teinte rousse (photos 4 et 8).
Les parties inférieures blanches sont lavées de roux sur les flancs et sur la poitrine où le roux forme un vague collier pectoral qui se voit sur la photo 6 montrant l’oiseau de face.

Chez la Rve, les parties supérieures sont d’un brun plus froid que celui de la Ref.
Le croupion et les sus-caudales sont concolores au dos et au manteau (photos 5 et 9).
Les flancs sont légèrement teintés de roux et le collier pectoral roussâtre ressort mieux sur fond clair (gorge blanche, haut de la poitrine et ventre crème) (photo 7).

Les juvéniles posent problème car leur plumage est teinté de roussâtre, ce qui fait que, hors contexte, une jeune Rve peut être prise pour une effarvatte.

Autres caractères physiques

:

La Ref est un peu plus « acrocéphale » que sa congénère, avec une tête plus fine et un bec moins épais.
Les tarses sont rose-brunâtres chez les deux espèces, mais en moyenne un peu plus foncés chez la Ref.
Enfin, la projection primaire, elle est légèrement plus importante chez la Rve dont les déplacements migratoires sont les plus importants (photos 8 et 9).
Mais attention, ces critères sont assez subtils et leur connaissance ne s’acquiert qu’avec l’expérience.

Les manifestations vocales

Leur chant est facilement reconnaissable et permet à lui seul l’identification. En revanche, les cris sont proches, mais quand même distincts.
Le chant de la Ref est un chant simple et monotone, peu mélodieux, fait de syllabes grattées, longuement répétées sans grande variation musicale.
Le chant de la Rve est bien différent. Il est très varié, musical et inclut des imitations. Il peut faire penser à un chant d’hypolaïs.

Chant de la Rousserolle effarvatte :
chant - Herman van der Meer (XC103722)
Chant de la Rousserolle verderole :
chant - FlackoWeasel (XC928915)

Chaque espèce possède deux cris, un cri bref d’inquiétude et cri long et rêche. Le cri bref de la Ref est un peu roulé et peut s’écrire « trec » tandis que celui de la Rve est pur et peut s’écrire « tec ». Un exemple de chacun :

Cri bref de la Ref :
Thomas Bergman (XC936438)
Cri bref de la Rve :
Grzegorz Lorek (XC923585)

Quant au cri long, il est presque le même chez les deux espèces. Celui de la Rve est simplement un peu plus dur.

Cri long de la Ref :
Peter Boesman (XC670033)
Cri long de la Rve :
Grzegorz Lorek (XC923586)


En conclusion,
la reconnaissance de nos deux petites rousserolles en période de reproduction ne pose pas de problème, essentiellement grâce au chant du mâle et à l’habitat. En revanche, sur les voies de migration ou les lieux d’hivernage du sud-est africain, ces deux paramètres font défaut et une analyse fine est nécessaire.

Créé le 11/11/2024 par Jean François © 1996-2024 Oiseaux.net