Assez commun en Lorraine, le Hibou moyen-duc échappe d'ordinaire à l'observation tant il est discret. Il faut de la patience, une pratique assidue du terrain et de la chance pour le repérer sur son site.
© Jean-Louis Corsin
Ce rapace est strictement nocturne. Il ne vole que du crépuscule à l'aube. Le jour il se tient immobile et presque vertical sur une branche dans l'épaisse ramure d'un arbre, de préférence un conifère. Son plumage aux tons vifs de brun jaune roussâtre, tacheté et strié de brun, a un aspect d'écorce. Inquiet, il se mincit en serrant ses plumes et ses ailes contre le corps.
S'identifiant ainsi à un moignon de branche cassé, il passe inaperçu.
Cet as du camouflage ne trahit sa présence certaine qu'en février, mars lorsque retentit son chant nuptial audible à plusieurs centaines de mètres. C'est une série plaintive de - ou ouou - émis à intervalles de 2 à 8 secondes et ce, pendant une durée renouvelée de 10 à 15 minutes. Autre manifestation révélatrice : les grincements stridents des jeunes oisillons affamés réclamant leur pitance après l'éclosion et jusqu'au sevrage. Pour les initiés enfin, un indice de présence de cet oiseau est constitué par les amas de typiques pelotes de réjection, toujours laissées au même endroit.
Si on a la chance d'apercevoir le Hibou moyen-duc, on ne peut guère le confondre avec un autre rapace, nocturne en particulier, comme la Chouette hulotte qui a sensiblement la même taille, mais plus massive. Le moyen-duc possède des iris orangés rouges et sur le haut de la tête deux aigrettes ayant l'aspect d'oreilles pointues, parures dont la hulotte aux yeux noires est dépourvue.
Contrairement à la Chouette hulotte, à la Chevêche d'Athéna et à la Chouette de Tengmalm autres oiseaux nocturnes plus ou moins présentes dans notre région, notre Hibou moyen-duc n'a pas besoin d'une cavité pour nicher. Le couple s'installe dans un vieux nid de corneilles, de pies, de rapaces ou d'écureuils. La femelle y pond 4 à 6 œufs qui sont couvés seulement par elle pendant 25 à 30 jours. Le rôle du mâle, exonéré de cette astreinte, consiste à nourrir sa partenaire pendant ce temps. Après la naissance des jeunes, c'est à lui qu'incombe aussi la charge principale de leur nourrissage.
Le régime alimentaire des Hiboux moyen-duc est constitué de petits rongeurs : campagnols et musaraignes auxquels s'ajoutent des petits passereaux et quelques gros insectes. A partir des sites de stationnement et de nidification: bois, grands bosquets, lisières de forêts et vergers, la chasse est surtout effectuée sur des espaces découverts : prairies et cultures ; mais les bois clairs, les clairières, les bords de route et de chemin sont aussi prospectés. Ce prédateur évite au contraire les forêts compactes, les bâtiments isolés et la proximité des habitations.
Les Hiboux moyen-duc de notre région sont sédentaires et même fidèles à leur site. Ceci n'exclue pas un certain erratisme pendant la mauvaise saison. En hiver le nombre de nos autochtones est sensiblement augmenté par des migrateurs venus du Centre et du Nord de l'Europe. Ceux-ci manifestent à cette occasion une grande sociabilité allant jusqu'à se regrouper à plusieurs dizaines dans leurs dortoirs en lisière de bois et de boqueteaux. Cette période n'étant guère propice à la promenade dans la nature, ces groupes d'oiseaux très épars restent la plupart du temps aussi inaperçus que nos couples solitaires en été.
Même sans comparaître, ce précieux et naturel auxiliaire de l'agriculture, mérite néanmoins d'emblée tous les sauf-conduits.